Après Charles Michel et Jean-Marc Nollet vendredi, c'était au tour de Pierre-Yves Dermagne (PS) et Alda Greoli (CDH) de s'enfermer dans le cube pour le deuxième « Duel ». Tous deux sont tête de liste à la Région Wallonne pour leur parti, l'un à Namur, l'autre à Liège. De quoi revenir sur la dernière législature, et le putsch du CDH, qui a quitté l'alliance avec le PS pour former une majorité avec le MR, et sur les scandales qui ont mené à cette rupture.
« Faites sortir Stéphane Moreau »
« Benoit Lutgen a décidé la rupture parce que nous n'arrivions pas à vous faire avancer sur un certain nombre de points au niveau de la bonne gouvernance. Deux ans après le divorce, le CDH ne regrette pas son geste, et Alda Greoli le fait bien remarquer à son adversaire. « Depuis que nous avons fait ce changement, il y a 400 administrateurs de moins dans les différentes structures. Nous avons mis fin à l'armée mexicaine des TEC, assène la ministre CDH. Et je vous demande encore une chose, dans l'intérêt de la ville de Liège: nous avons sorti 400 personnes, je vous demande d'en sortir une seule: Stéphane Moreau ».
Pierre-Yves Dermagne refuse de passer pour le seul vilain petit canard. « J'ai porté, comme Ministre des pouvoirs locaux, toute une série de réformes importantes, avec toute une série de suppression de postes, de mandats, des réformes en matière de décumul... » L'ancien Ministre PS tient par ailleurs à rappeler que le premier qui a avoué qu'il contournerait les règles de décumul n'était pas un PS, mais le président du CDH, Maxime Prévot. Et il n'hésite pas à se positionner par rapport à l'interpellation d'Alda Greoli quelques instants plus tôt: « Pour moi, dans l'intérêt des 3000 travailleurs de Publifin, c'est important que Stéphane Moreau fasse un pas de côté et quitte Publifin ».
Quant aux récents scandales qui ont éclaboussé leurs partis respectifs, avec Alain Mathot d'un côté, Dimitri Fourny de l'autre, les deux candidats sont d'accord: il est « vraiment indispensable qu'on mette fin à ces pratiques », s'indigne Alda Greoli. Tous les deux accordent pour l'instant la présomption d'innocence à leurs collègues, mais affirment qu'ils seront mis de côté en cas de condamnation.
Une boite de secours pour Pierre-Yves Dermagne
Les deux candidats avaient enfilé les gants dès les premières minutes. Alda Greoli profite de l'objet qu'elle a apporté pour attaquer Pierre-Yves Dermagne et son parti: « J'ai l'honneur de vous offrir une boite de premiers secours. Pourquoi? Parce que l'assurance autonomie n'aura pas vu le jour en Wallonie, précise l'actuelle Ministre de la Santé. Au moins, si vous vous cassez un bras et que vous ne savez plus faire à manger à vos enfants, vous aurez une boîte de premiers secours », conclut Alda Greoli, qui dit espérer que le PS acceptera de mettre cette assurance autonomie en place dans la prochaine législature.
« Nous sommes d'accord que cette assurance autonomie est importante », rétorque Pierre-Yves Dermagne. Pour le candidat PS, ce qui a bloqué son parti, ce n'est pas le principe de l'assurance autonomie, mais son application. Selon les socialistes, « chacun devrait cotiser en fonction des ses moyens, et recevoir en fonction de ses besoins. Ce n'est pas juste que tout le monde paye la même chose, insiste Pierre-Yves Dermagne. Ceux qui gagnent plus devraient cotiser plus. »
Nous sommes d'accord, MAIS
Pendant ces 20 minutes de débat, la réponse d'un candidat à l'autre débute souvent par ces mots. Notamment pour ce qui concerne la réforme des APE, les aides à la promotion de l'emploi. C'est le cadeau que Pierre-Yves Dermagne a décidé d'apporter à sa consoeur du CDH. Un point APE, qui vaut selon les deux candidats « un peu plus de 4000 euros » (3100 euros, selon le site de la Région Wallonne). « Ça n'a l'air de rien, et pourtant c'est essentiel pour 62 000 personnes en Wallonie et à Bruxelles qui, au quotidien, effectuent des services à la population dans les crèches, les écoles, dans des ASBL... », affirme Pierre-Yves Dermagne.
Avec ce point APE, le bourgmestre PS de Rochefort veut interpeller Alda Greoli sur la réforme des APE initiée par le gouvernement MR-CDH. Alda Greoli est d'accord: « Ces 60 000 emplois permettent de rendre des services indispensables à la population ». Mais, répond-elle, « le CDH a dû bloquer la réforme de Madame Tillieux (ancienne Ministre PS), qui voulait supprimer 200 millions sur le milliard de budget des APE ». Une affirmation fausse, pour Pierre-Yves Dermagne, qui insiste: le secteur a manifesté plusieurs fois contre la nouvelle réforme du MR et du CDH, parce qu'elle ne répond pas aux besoins du secteur.
Enfin, le débat se poursuit sur des questions d'éthiques. Le PS était présent ce samedi à la Belgian Pride, la parade organisée pour défendre les droits de la communauté LGBT. Mais aucun char CDH n'était présent. « En tant que responsable politique, je préfère participer à moins de manifestations mais poser plus de gestes de responsabilités », se justifie Alda Greoli, qui prend l'exemple des Maisons Arc-en-ciel, qu'elle affirme avoir pérennisées.
Plus loin que la communauté LGBT, Pierre-Yves Dermagne embraye sur un sujet qui a fait l'actualité au sein du CDH : l'avortement. Plusieurs partis voudraient étendre le délai pour procéder à une interruption volontaire de grossesse, mais les chrétiens-démocrates ont semblé plusieurs fois divisés sur la question. « Quelle est la vraie position de votre parti par rapport à la possibilité d'étendre l'IVG jusqu'à 18 semaines ? » demande Pierre-Yves Dermagne. Alda Greoli tient d'abord à rappeler un élément: aucun CDH ne remet en cause l'importance de l'IVG. « Mais nous estimons que trois mois de grossesse, c'est suffisant », conclut Alda Greoli. Une réponse regrettée par Pierre-Yves Dermagne.Lundi, pour le troisième numéro de « Duel », place à un autre CDH, Benoit Lutgen, ancien président du parti. Il fera face à Olivier Chastel, lui aussi ex-président de son parti, le MR.
Arthur Lejeune, RTBF
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